La ville d'Emmaüs n'est pas mentionnée dans les textes bibliques ou autres textes anciens avant la période hasmonéenne. Une source importante d'informations sur l'histoire de la vallée d'Ayalon avant l'arrivée des tribus d'Israël en Terre promise se trouve dans les archives épistolaires des pharaons Amenhotep III et Amenhotep IV (XVe-XIVe siècle av. J.-C.), découvertes à El-Amarna (Égypte). Ces textes révèlent le rôle dominant de la ville de Gézer dans cette région, et mentionnent également la ville d'Ayalon. Les villes de Gézer (Guézer, Gazer) et d'Ayalon (Ajalon) sont aussi souvent mentionnées dans la Bible, de même que le village de Shaalbim (Shaalabbin, Saalbim), situé dans la partie nord de la vallée d'Ayalon.
La Bible parle d'une importante bataille qui eut lieu entre les Hébreux et les Cananéens vers 1200 av. J.-C., peu après l'arrivée des tribus d'Israël en Terre promise. L'armée israélite, dirigée par Josué, effectua une marche nocturne depuis Guilgal pour aider ses alliés Hivites de la ville de Gabaon, attaquée par cinq rois Amoréens. Josué remporta la bataille au pied des remparts de Gabaon, poursuivit les Amoréens et leur infligea une défaite cuisante sur le chemin de Beth-Horon. Au cours de la poursuite, les Israélites atteignirent la vallée d'Ayalon (Livre de Josué, ch. 10):
Peinture d'Esteban March, XVIIe s.
L’Éternel dit à Josué: Ne les crains point, car je les livre entre tes mains, et aucun d’eux ne tiendra devant toi. Josué arriva subitement sur eux, après avoir marché toute la nuit depuis Guilgal. L’Éternel les mit en déroute devant Israël; et Israël leur fit éprouver une grande défaite près de Gabaon, les poursuivit sur le chemin qui monte à Beth Horon, et les battit jusqu’à Azéka et à Makkéda. (...) Alors Josué parla à l’Éternel, le jour où l’Éternel livra les Amoréens aux enfants d’Israël, et il dit en présence d’Israël: « Soleil, arrête-toi sur Gabaon, et toi, lune, sur la vallée d’Ayalon!». Et le soleil s’arrêta, et la lune suspendit sa course, jusqu’à ce que la nation eût tiré vengeance de ses ennemis.
Livre de Josué 10, 8-10; 12-13, LSG
Josué partagea la Terre promise entre les douze tribus d’Israël, et le territoire, où Emmaüs se trouve aujourd’hui, fut donné à la tribu de Dan:
La septième part échut par le sort à la tribu des fils de Dan, selon leurs familles. La limite de leur héritage comprenait Tsorea, Eschthaol, Ir-Shémesh, Shaalabbin, Ajalon, Jithla, Élon, Thimnatha, Ékron, Eltheké, Guibbethon, Baalath, Yehud, Bené Berak, Gath Rimmon, Mé Yarkon et Rakkon, avec le territoire vis-à-vis de Japho.
Livre de Josué 19, 40-46, LSG, voir le texte original ici.
Dans le passé la ville d'Ir-Shémesh («Ville du Soleil»), mentionnée dans ce texte, fut identifiée par des chercheurs comme étant Emmaüs, en se fondant, en particulier, sur l’un des manuscrits de la Septante, le Codex Vaticanus, qui traduit Ir-Shémesh par «Polis Samaous», voir le texte de la Septante ici. Les chercheurs modernes ne partagent pas ce point de vue. Voir: Hadrian Reland, Palestina ex monumentis veteribus illustrata, Trajecti Batavorum (Utrecht), 1714, t. II, pp. 656-657 (voir ici) ; Edward Robinson, Researches in Palestine, Mount Sinai and Arabia Petrae, t. III, London, 1841, p.19, note 6 (voir ici); Vincent, Abel, Emmaüs, sa Basilique, son histoire, Paris, 1932, p.p. 285-286, 412-413 (voir ici).
La tribu de Dan ne réussit pas à conquérir la vallée d'Ayalon, s'étant heurtée à l'alliance militaire des villes cananéennes de Gézer et de Gath, mentionnée dans les textes d'el-Amarna :
Les Amoréens repoussèrent dans la montagne les fils de Dan, et ne les laissèrent pas descendre dans la plaine.
Livre des Juges 1, 34, LSG
En conséquence, une grande partie de la tribu de Dan se déplaça vers le nord du pays, tandis que la tribu d'Ephraïm poursuivit les efforts pour s'emparer de la vallée :
Lorsqu'Israël fut assez fort, il assujettit les Cananéens à un tribut, mais il ne les chassa point. Éphraïm ne chassa point les Cananéens qui habitaient à Guézer, et les Cananéens habitèrent au milieu d'Éphraïm à Guézer... Les Amoréens voulurent rester à Har Hérès, à Ajalon et à Schaalbim; mais la main de la maison de Joseph s'appesantit sur eux, et ils furent assujettis à un tribut.
Livre des Juges 1, 28-29, 35, LSG
Dans la première moitié du XIIe siècle avant J.-C. les Philistins, apparemment originaires des îles de la mer Égée, conquirent la côte méditerranéenne méridionale de la Terre sainte. Des données archéologiques suggèrent qu'à la fin du XIIe siècle av. J.-C., les Philistins progressèrent vers le nord-est et soumirent la ville de Gézer. Les tentatives des Philistins de pénétrer plus à l'est et au nord rencontrèrent l'opposition des Israélites, qui cherchaient à étendre leur conquêtes vers le sud-ouest jusqu'à la plaine de la Shéphélah. Des batailles eurent lieu dans les territoires d'Ephraïm, de Benjamin et de Juda. Au milieu du XIe siècle avant J.-C., après la défaite des Israélites à la bataille d'Aphek (1 Samuel 4:1-2), les Philistins parvinrent à obtenir le contrôle de la région montagneuse de la tribu de Benjamin.
Dans la seconde moitié du XIe siècle av. J.-C. un régime monarchique s'établit chez les Israélites et le roi Saül fit des efforts considérables pour repousser les assauts des Philistins. La première bataille importante de Saül contre les Philistins, vers 1025 av. J.-C., fut celle de Michmas (1 Samuel 13-14). Les Israélites réussissent à chasser les Philistins des montagnes vers la plaine de la Shéphélah. Les Hébreux poursuivirent les Philistins jusqu'à la vallée d'Ayalon :
L'Éternel délivra Israël ce jour-là, et le combat se prolongea jusqu'au delà de Beth Aven... Ils battirent ce jour-là les Philistins depuis Micmasch jusqu'à Ajalon.
1er Livre de Samuel, 14, 23, 31a, LSG
Le royaume de Saül comprenait probablement la ville d'Ayalon et la partie de la vallée adjacente, tandis que Gézer restait aux mains des Philistins. La preuve de la présence israélite dans la vallée d'Ayalon à cette époque se trouve dans le fait qu'Eliahba le Schaalbonite, c'est-à-dire un habitant de Shaalbim, fut mentionné dans la liste des preux de David en 2 Samuel 23, 32 ( cf. 1 Chron. 11:33). Tout au long du règne de David (entre environ 1000 et 967 av. J.-C.) la vallée d'Ayalon continua à être partagée entre Israël et les Philistins:
David fit ce que l’Éternel lui avait ordonné, et il battit les Philistins depuis Guéba jusqu’à Guézer.
2e livre de Samuel 5, 25, LSG
Ce n'est qu'à l'époque du roi Salomon (en 965 av. J.-C. environ) que la ville de Gézer passa sous le contrôle israélite à la suite d'une alliance militaire conclue entre Israël et l'Égypte, scellée par le mariage de Salomon avec une princesse égyptienne :
Pharaon, roi d'Égypte, était venu s'emparer de Guézer, l'avait incendiée, et avait tué les Cananéens qui habitaient dans la ville. Puis il l'avait donnée pour dot à sa fille, femme de Salomon.
1er livre des Rois, 9,16 LSG
Salomon reconstruisit la ville de Gézer, qui devint l'une des principales forteresses de son royaume (1 Rois 9, 17), servant de bastion avancé contre les Philistins. Après la mort du roi Salomon, la vallée d'Ayalon revint au royaume de Juda.
Après le retour des Juifs de l'Exil à Babylone (fin du VIe siècle av. J.-C.), la vallée d'Ayalon fut intégrée à la province perse de Judée (Yehud Medinata).
Avant cette période la seule route reliant Jaffa à Jérusalem passait par Beth-Horon, le long de l'extrémité nord de la vallée d'Ayalon. À l'époque Perse, une autre route apparaît, traversant la vallée dans les environs d'Emmaüs. (Voir M. Fischer, B. Isaac, I. Roll, Roman Roads in Judaea II, Oxford, 1996, pp. 326 et suivantes).
Au début du IIe siècle avant J.-C., les souverains séleucides rattachent la ville de Gézer à l'Idumée, et la région d'Emmaüs se retrouve à l'extrémité occidentale de la province de Judée. Les autorités hellénistiques prennent de nombreuses mesures pour assurer la sécurité des voyageurs sur la route entre Emmaüs et Jérusalem. C'est à cette époque (1ère moitié du IIe siècle av. J.-C.) que remontent les premières traces archéologiques d'un village fortifié d'Emmaüs, découvertes sur la colline d'al-Aqed au Park Canada (Ayalon), voir: H. Hizmi, M. Haber, et E. Aharonovich, From the Maccabees to Bar Kokhba: Evidence of Fortification and Revolt at Khirbet el-'Aqd. The Results of the Renewed 2012 Excavations, dans: New Studies in the Archaeology of Jerusalem and its Region, vol. VII, 2013, pp. 6-24.